OM Olympique de Marseille

Mars 1937 OM Strasbourg 4 à 0

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14 Mars 1937 Stade de l'Huveaune
OM bat Strasbourg 4 à 0 ( 1 - 0)

Arbitre Mr Raguin
Buts Weiskopf Zatelli Weiskopf Weiskopf
OM Vasconcellos, Ben Bouali, Henri Conchy, Bastien, Bruhin, Granier, Zermani, Ignace, Zatelli, Aznar, Weiskopf.
STRASBOURG Dessonet, Lohr, Schwartz, Halter, Hummenberger, Roessler, C. Keller, Hoffmann, Rohr, Heisserer, Fritz, Keller

Etre battus de 4 buts à 0 au lendemain de leur qualification pour les demi-finales de la Coupe de France, voilà qui a dû remplir d'amertume les coeurs strasbourgeois aujourd'hui. Aussi bien, tout à l'heure, ne paraissaient-ils pas particulièrement satisfaits quand ils regagnèent le curieux vestiaire aérien que l'Olympique de Marseille offre à ses visiteurs
.On a, du balcon, une vue admirable sur un vaste panorama de la campagne provençale, mais de ce spectacle, ni le gai soleil printanier n'éclairaient leurs visages et la joie qui était tout à l'entour demeurait réservée aux enthousiastes spectateurs méridionaux, attendant l'annonce des autres résultats de la journée, en même temps que la sortie des héros du jour.
Avouons que la marque de 4 à 0 est bien dure pour le R.C. de Strasbourg, lequel n'a pas démérité et, au contraire, a fait honneur à sa réputation par la qualité du football qu'il joua. Ce fut encore une fois l'histoire d'occasions perdues par les battus et d'une réussite constante chez les vainqueurs.
On doit dire, toutefois, que tandis que les ALsaciens s'appliquaient à passer et repasser la balle avec précision, à la recherche d'une chance fugitive et shooter, leurs adversaires n'avaient qu'une idéee celle de l'offensive à outrance, directe, soutenue, inlassable.
La présence de nombreux Nord-Africains dans l'équipe marseillaise porte ses fruits.
La vitesse de jeu, la rapidité d'attaque, de la balle, l'enthousiasme débordant sont à l'honneur. il est curieux de noter, d'ailleurs, que gagnés par cette chaleur d'action, pris dans ce souffle de mistral, des joueurs d'origines diverses, tels Ignace, Weiskopf, Bruhin, montrent une pareille spontanéité.
Tous ceux qui ont vu, cette saison l'Olympique de Marseille peiner sur les boueux et glissants terrains de Paris , du Nord ou de l'Est, ont quelque peine à se faire à l'idée de voir demeurer aux côtés du F.C. Rouen l'équipe méridionale, si souvent vue à son désavantage.
C'est qu'il faut aux joueurs du Parc Borelly, non plus la boue, ni le triste crachin, mais le soleil.Ils l'eurent aujourd'hui et les Strasbourgeois furent débordés sous les assauts subis.
Certes, ce ne fut pas pour l'Alsace, malgré la marque, une déroute. Au changement de camps, un seul but avait été acquis : quand Marseille consolida son avantage, on était encore très loin de prévoir un net écart entre les équipes.
La chance montra quel était son favori, quand Curt Keller shoota sur la barre du but inoccupé.
Les deux derniers points furent réussis coup sur coup peu avant la fin.
C'est l'ailier Weiskopf qui fut le grand marqueur de buts. Il légitima la confiance placée en lui par ses dirigeants, lesquels n'hésitèrent pas à écarter Kohut de l'équipe en sa faveur.
Certes Weiskopf est assez loin d'avoir la classe de son rival, mais son activité constante, sa fougue s'apparentent admirablement au ton de ses autres partenaires

Weiskopf réussit le premier point au sortir d'une mêlée, et alors que Dessonet était à terre. Le second but ne fut pas marqué par lui, mais c'est sur un de ses centres  que Zatelli réussit un coup de tête décisif. L'avant-centre ne tarda pas à rendre le service dont il avait bénéficié.
En effet, et ce fut le plus bel exploit de la journée, Zatelli, échappant à Hummenberger, dribbla droit devant lui , jusqu'à ce qu'il eut attiré Lohr. Il glissa alors la balle derrière l'arrière strasbourgeois et Weiskopf qui avait suivi le mouvement à son tour, entra en action, shootant dans les filets au moment même où Dessonet s'élançait à sa rencontre.

Quand Weiskopf compléta le coup du chapeau ce fut comme ne conclusion à une belle offensive de toute la ligne et qui, en quelque sorte, laissa les Alsaciens sur place.
Ayant dit les mérites de Weiskopf, marqueur de buts avisé, je dois ajouter que toute la ligne d'attaque alerte, qu'emmène un avant-centre né,  Zatelli, reçoit l'inspiration et se voit donner le ton par Ignace.
Certes, on peut reprocher à cet intérieur la rareté de ses tirs au but, mais le nombre et la variété de ses passes mettent tout à tout en évidence chacun des autres attaquants. Son activité inlassable joua aujourd'hui un grand rôle.
Le demi droit Bastien,qui neutralisa, ou peu s'en faut, Fritz Keller, fut également au nombre des footballeurs remarqués. Le style de ce joueur n'a rien de particulièrement classique, en fait on peut lui reprocher dans sa lutte avec Keller, qui s'efforça de se comporter de même, nombre de charges incorrectes, mais son activité souvent heureuse l'imposait constamment à l'attention.
Etroitement marqué, Rohr lutta avec courage.
Des frères Keller. Curt, qui avait affaire à moins forte partie, fut le plus souvent en évidence. Les intérieurs, les demis, parmi lesquels Hummenberger se montra admirable, témoignèrent de leur application coutumière.

Celle ci ne pouvait suffire aujourd'hui devant marseille, jouant en leader de championnat voulant défendre son rang et inspiré dans la plupart de ses actes. Ce très beau match conserva toujours son intérêt et se déroula normalement devant une foule record.
Il le doit au caractère justement sévère de l'arbitrage de M. Raguin qui, à tout instant, et il eut un très grand mérite à le faire, garda les deux équipes en mains.
La chance parut nettement à son avantage par rapport à celle, vraiment incertaine, des Strasbourgeois.

On vit aujourd'hui Vasconcellos, non seulement arrêter  admirablement des balles hautes, mais aussi plonger avec décision.

Théâtral, peut-être, spectaculaire, sans doute, mais quel brio !
Les arrières Conchy, et plus particulièrement encore Ben Bouali, marquèrent de près les Alsaciens. Toute lenteur, toute hésitation de l'adversaire aboutissaient à un dégagement opportun.

Après cela, on juge que les gerbes de fleurs n'ont pas dû être offertes en témoignage d'admiration aux joueurs du Racing Club de Srasbourg, mais par simple sentiment d'équité, on insistera de nouveau sur la belle ordonnance du jeu qu'ils pratiquèrent auquel ne fit défaut que la conclusion.

L'OM sera champion à la fin de la saison.