OM Olympique de Marseille

L'Affaire Leclerc, Juillet 1972, la nuit des longs couteaux

L'affaire Leclerc, si on peut l'appeler ainsi, est tout entière contenue dans la personnalité de l'ex-président de l'OM.
Ses causes sont donc lointaines. "Les plus anciennes ont 51 ans", disait avec malice un supporter de l'OM, mercredi matin : l'âge de Marcel Leclerc.
Ce dernier était fait pour jouer les équilibristes et les funambules, donc un jour ou l'autre, pour se casser la figure. Mais il n'est pas utile de porter aussi loin son regard ou de fouiller à fond une personnalité aussi considérable de notre football pour tenter d'expliquer ce qui lui arrive aujourd'hui.
Mars 1972 Marcel Leclerc annonce qu'il est sur le point d'engager Eugène Steppé, ancien secrétaire général d'Anderlecht, comme directeur sportif.
Il ne mit personne au courant des contacts pris avec Steppé et pas davantage de leur conclusion. Il compte mettre tout Marseille, à commencer les dirigeants, les entraîneurs et les joueurs devant le fait accompli.
Le comité directeur rue dans les brancards. Mario Zatelli, toujours prudent, se paie le luxe d'une audace : " A quoi servons-nous si l'on ne nous dit rien."
La position de Marcel Leclerc est ébranlée. Il est obligé de composer avec son comité directeur dont on peut dire jusque-là, qu'il s'est soumis ou a idolâtrie à son président en bénissant de gré ou de force tous ses actes. Il fait marche arrière, Steppé ne viendra pas.
C'est un début de victoire pour le comité directeur qui, soudain, mis en appétit, en obtient une autre d'importance, il exige la double signature pour les chèques de l'OM qui, jusque-là, pouvaient être tirés avec le seul paraphe du président.

Le vent commence à tourner. Marcel Leclerc ne l'a plus complètement dans le dos...
7 juillet 1972 à l'assemblée fédérale d'Ajaccio, Marcel Leclerc reçoit une véritable volée de bois vert sur laquelle il est inutile de revenir en détail. Son moral est atteint. Beaucoup plus qu'on ne le croit.
Le lendemain, au téléphone, il annonce à l'un de ses collaborateurs "que sa décision est prise". Il quittera l'OM.
Il a conduit l'OM au sommet mais contrairement à Saint-Etienne, et à Roger Rocher, ses bêtes noires, il n'a jamais été reçu à l'Elysée avec son équipe. Ceux qui le connaissent savent que c'est une péripétie qui comptait pour lui...
Fatigué, il y a longtemps qu'il l'est. Cela fait plus d'un an maintenant qu'il songe plus ou moins à passer la main.
Il a même désigné son successeur M. Terrin qui est une forte personnalité de Marseille, directeur d'écuries, président du Grand Delta, membre du super Club ami de Marcel Leclerc. Un remarquable gestionnaire, doté d'une grande efficacité. On ne sait jamais..

Si certains pensent que Marcel Leclerc a été purement et simplement mis à pied par les treize autres membres du comité directeur de l'OM., ils se trompent en partie. Mais en partie seulement car une fois placé devant la démission exigée de ses pairs, Leclerc s'est rebiffé. C'est alors, que la première fois, il s'est vraiment incliné et a plié bagages.
Cet épisode du départ nous ramène aux événements de la semaine dernière. Ils ont plus bouleversé la vie de l'OM qu'une certaine apparence de calme pourrait le laisser croire aujourd'hui.
Mardi 19 h. Avant l'OM-Slavia de Prague le président marseillais reçoit les dirigeants tchèques dans son bureau. Il les garde une dizaine de minutes. S'adressant aux journalistes, il assure, détendu, que la séance du comité directeur, fixée à 23 heures, durera une heure tout au plus.
Puis, il ajoute : "Ce sera à prendre ou à laisser !" C'est, maintenant, une quasi-certitude, il va se passer quelque chose d'important.
22h45 On sait que le sujet de la discussion est en principe le sabordage éventuel de l'OM pro.
En fait cette question semble d'ores et déjà réglée, puisqu'un membre du comité directeur déclare : "Quoi qu'il arrive l'OM continuera." C'est donc d'autre chose que l'on va parler. De gros sous, ça ne fait pas l'ombre d'un doute. .
24 heures. La petite heure pronostiquée par M. Leclerc est à l'eau. Mais la séance ne fait que commencer.
"Elle durera jusqu'à quatre heures du matin" a affirmé un aute membre du comité direceur. Quelqu'un au courant.
Mercredi 3h15 M. Henri Neumann sort et déclare au représentant de l'A.F.P. fidèle au poste alors que tous ses confrères sont au lit : "l'OM section professionnelle continue d'exister."
On s'en doutait un peu et ce n'et pas le plus important de l'affaire. Pendant soixante minutes l'affrontement devient alors violent entre d'un côté le président Leclerc, seul, et de l'autre les treize du comité direceur. Les injures, les menaces pleuvent. C'est la grande scène de famille avec, en prime, un déballage d'autant plus complet que les derniers témoins ont vidé les lieux. Une belle pièce d'anthologie qui s'achève à 4h15.
La Victoire en Finale contre Bastia et le doublé de l'OM ont consacré l'action de Marcel Leclerc.
Dans le jour qui point Marcel Leclerc, sait déjà qu'il est un président en sursis.
9 heures. Un coup de téléphone d'un membre du comité directeur de l'OM avertit M. Junqua, secrétaire général du Groupement qu'en aucune façon M. Leclerc ne peut plus engager l'OM.
Un peu plus tard, le président de l'OM a un entretien avec M. Gaston Defferre, député-maire de la ville.
Il le met au courant de sa démission. Ce dernier enregistre.

Marcel Leclerc a quitté l'OM