L'Histoire de l'Olympique de Marseille

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Avant l'histoire Olympienne
Messieurs les Anglais, tirez les premiers !

"Il a été décidé par quelques gentlemen anglais de Marseille de se réunir pour former un Athlétic Club dans l'intention de pratiquer ensemble toutes sortes de sports athlétiques comme le cricket, la natation, la gymnastique, etc."

Ainsi, le 1er juin 1878, l'année même où le mot "sport" est reconnu par l'Académie française, apparaît la première tentative sérieuse de création d'un club omnisports à Marseille : l'Athlétic Club. Jusqu'ici, la pratique sportive n'a touché dans la ville qu'à des domaines ciblés tels l'hippisme, l'excursionnisme, la gymnastique, l'escrime, voire la course à pied ou le vélo, mais il n'y a jamais eu plusieurs sortes d'activités physiques au sein d'un même club.

En complément: Voir la pratique du football au début des années 1900.
A en juger par la place exceptionnelle que tiennent les Anglais dans la diffusion du sport en France à l'époque, il n'est pas étonnant que cette initiative soit anglaise. Les Anglais, gens de mer, ont une longue pratique du port de Marseille, où 9 000 marins britanniques font escale chaque année. En outre, le développement d'activités industrielles nouvelles comme la construction mécanique, le gaz ou le télégraphe y ont donné depuis quelques décennies un poids encore plus important aux entrepreneurs, ingénieurs, cadres et spécialistes d'Outre-Manche. A lire la liste de ses vingt-cinq premiers membres, le club compte à ses débuts, en plus du vice-consul et du chapelain anglica, cinq négociants, deux commerçants, deux représentants de commerce, dix télégraphistes (dont un ingénieur) de l'Eastrn Telegraph Company qui assure les liaisons avec l'Afrique du Nord, Malte et l'Extrême-Orient, un entrepreneur, deux ingénieurs du gaz.
Le comité de l'Athlétic Club se propose d'organiser d'abord des épreuves de cricket pendant les mois d'été. Encore faut-il se procurer un terrain. On se met à sa recherche, mais l'histoire ne nous dit pas si on le trouva, ni même ce que devint le club. Poursuit-il des activités confidentielles au sein de la colonie britannique ? Succombe-t-il, à peine né, à des problèmes financiers et d'organisation matérielle ? Quoi qu'il en soit, la tentative était en elle-même intéressante et annonciatrice des futures passions sportives phocéennes. L'histoire ne nous dit pas non plus si les Anglais de l'Athlétic Club en profitèrent pour donner à Marseille les premiers coups de pieds "organisés" dans un ballon de rugby ou de football dès 1878. Mais pourquoi pas, après tout ? Ne l'avaient-ils pas déjà fait au Havre, par exemple dès 1872 ?
Rugbymen avant tout
Avec ou sans l'Athlétic Club, l'initiation au football ne pouvait venir que des Anglais.
Dès les années 1880-1890 (et jusqu'à la Première guerre mondiale), il est de tradition que les équipages des navires anglais touchant au port constituent des équipes de rugby et profitent de leur escale pour s'exercer à leur sport favori.
Sur place, leurs compatriotes les accueillent et jouent avec eux ; en particulier, les employés de d'Eastarn Telegraph Company, qui finissent par avoir leur propre équipe.
En 1891, quelques jeunes étudiants Marseillais créent un Football Club (le premier du genre dans la ville) et, au terme de quelques galops d'entraînement, lancent un défit à l'équipe de l'Eastern Telegraph.

La défaite des étudiants est cuisante et met un terme au jeune club. Deux ans plus tard, Marseille relève le gant pour tenter de battre les Anglais à leur propre jeu.
Ébauché dès le mois de juin, le projet, après quelques séances d'initiation, prend définitivement corps en septembre. Il s'articule autour du Fol Club, une société de jeunes étudiants et d'élèves du Lycée de Marseille qui ont l'habitude d'organiser des soirées dansantes et qui veulent varier les plaisirs. Donc, un soir de septembre 1893, le président Pélissier convoque en assemblée extraordinaire la trentaine de fidèles qui hantent habituellement le club dans son local de la rue du Théâtre-Français, au dessus du café des Allées.
Là, il propose de se réorganiser en société de football-rugby, comme on disait à l'époque, autour de Claude Roce et Eugène Blancard, acteurs de l'échec de 1891. L'idée est aussitôt adoptée et un gigantesque punch salue à la fois l'enterrement du Fol Club et la naissance du Sporting Club de Marseille. Au terme d'un monôme improvisé sur la Canebière et le port, tout le monde décide de se retrouver le dimanche suivant au Champ de Mars du rond-point du Prado pour le premier entraînement.
Au jour dit, seize gaillards, équipés de maillots multicolores, de culottes courtes et de jambières fabriquées avec des bas anglais qui montent sur les genoux, s'affrontent à huit contre huit sur le terrain bosselé et jonché de détritus du champ de manœuvres du Rouet.
Devant un public largement féminin en toilettes estivales claires, la rencontre n'est pas très académique, mais les saignements de nez et les mâchoires endolories ne calment pas l'ardeur des combattants.
Dans les semaines qui suivent, les progrès sont rapides grâce à l'arrivée au Sporting Club d'Adams, Kimes, Munro et de quelques autres Anglais recrutés parmi les habitués de l'American Bar, aux Allées de Meilha, un café que vouent déjà au sport des tabourets haut perchés et les portraits des célébrités sportives du moment affichés par le patron, l'Anglais Henry Victor, lui-même ancien lutteur, boxeur et rugbyman.
Bientôt le S.C.M. cherche à diversifier ses activités.Peine perdue, l'escrime échoue, de même que l'haltérophilie. L'athlétisme, lui, réussira, mais plus tardevement. En 1893-1894, seul le rugby est pratiqué avec quelque régularité, grâce notamment à l'arrivée de l'Anglais Bergl, recommandé par l'U.S.F.S.A., qui, par son élégance , son brio, la précision de son jeu, peut être considéré comme le véritable initiateur du rugby à Marseille.
Début 1895, une étape importante est franchie. Les marins du "Caledonia", steamer anglais de la Peninsular Oriental, proposent au S.M.C. un match amical. La rencontre est conclue pour le dimanche 3 février 1895.Pour ce grand jour, le S.M.C. s'était renforcé de Mathous, un joueur du Racing Club de Paris de passage à Marseille.

Du coup, les Marseillais se mettent à s'intéresser à ce qui n'était encore pour eux quelques semaines plus tôt qu'un amusement brutal et débraillé.

Trois jours après le match, le premier numéro de "Midi Sport" paraît à Marseille avec le soutien de 800 abonnés, tous fervents supporters du S.M.C.: la presse sportive marseillaise est née !
Le premier match de football à Marseille

Au soir de leur victoire, les joueurs du Sporting n'ont pu faire autrement qu'accorder leur revanche aux gens du "Caledonia". Tout le monde se retrouve donc le 10 février au Champ de Mars.
Mais à la demande des marins anglais, le match retour se fait non plus au football-rugby mais aux football-association : c'est la première partie de foot dont Marseille ait gardé le souvenir.

Les Anglais n'ont pas de mal à dominer une équipe marseillaise qui joue au football pour la première fois et n'en connaît pas bien les règles. Dès les première minutes, ils marquent quatre buts.
L'anglais de Marseille Bergl inscrit ensuite un premier but pour le S.C.M. sur faute anglaise, puis un second en début de deuxième mi-temps.
Albert Gilly, fatigué de courir, passe alors dans les buts du Sporting et sauve son camp à plusieurs reprises avant d'encaisser un cinquième et dernier but britannique. Le résultat final, 5 à 2, est tout compte fait un score honorable pour des footballeurs improvisés.
Dès lors, le football-association entre dans les activités du club, mais sans détrôner le rugby, qui nourrit de plus hautes ambitions depuis la victoire sur le "Caledonia" : par exemple, affronter les équipes plus chevronnées de Paris, Lyon et Bordeaux. En mars 1895, une défaite contre le Football Club Lyonnais viendra rappeler à plus de modestie les rugbymen marseillais. Le 20 novembre 1895, gros progrès par rapport aux culs de bouteilles et au silex du champ de manœuvres, le S.C.M. obtient de la mairie d'utiliser l'hiver la pelouse du parce Borély, qui devient pour longtemps, avec bientôt trois terrains temporaires, le principal lieu d'évolution des rugbymen et des footballeurs marseillais.

Les arrivées des frères Yvan, venus du Racing Club de Paris, et de F. Bouisson renforcent le Sporting en 1895 et 1896, mais il perd des Anglais qui repartent comme Bergl et Raoult vont faire leur service militaire et que plusieurs autres athlètes sont absorbés par la vie professionnelle ou familiale.

La disparition du SCM en 1897 (il reviendra un an plus tard) va donner l'idée à d'autres mordus de créer de nouvelles équipes et parmi elles le Football Club de Marseille.

La Création de l'OM